Monthly Archives: August 2013

You know what? I’m hhhaaaaaappy!

Disait Droopy dans les Tex Avery de ma jeunesse. Cela reflète assez bien mon état d’esprit du jour.
Le 25 juin dans mon post “Gaz de Schiste bis repetita”, il a été, un peu trop discrètement apparemment, suggéré aux députés Vert’libéraux de proposer un moratoire sur les forages. Apprendre que La Conseillère Fédérale Doris Leuthard vient d’écrire aux opposants au forage de Noiraigue, en recommandant notamment d’attendre et également en soulignant que le but n’est pas plus de fossile mais bien de passer au renouvelable, m’a réchauffé le cœur.
J’en reste totalement convaincu, un simple moratoire de 5-10 ans et l’on ne se posera très certainement plus la question, car d’une part le retour d’expérience sur les autres exploitations gazières se sera suffisamment étoffé, mais d’autre part, nous aurons également atteint un tel niveau de conséquences liées au réchauffement climatique, que l’incongruité d’un tel projet éclatera au grand jour.

Laurent-David Jospin

Sources : L’Express du 17.08.2013, site web de la RTS

Le coût de la perte de bio-diversité

Pour beaucoup d’entre nous, lorsqu’on nous annonce une perte de bio-diversité, cela reste très virtuel et les conséquences néfastes nous semblent bien lointaines voir carrément incertaines.

Vous commencez à me connaître, et vous devez déjà vous demander quelle construction intellectuelle je vais soumettre à votre sagacité qui va chercher à démontrer le contraire.

J’espère ne pas trop vous décevoir, mais on va vraiment rester très terre à terre au sens propre.

Les moins jeunes de mes lecteurs doivent certainement se rappeler les magnifiques prés de notre enfance parsemés de fleurs de toutes les couleurs. Aujourd’hui, tout cela appartient au passé (à moins d’aller en montagne, là où la civilisation n’a pas encore trop sévi). Les champs engraissés à l’excès par une sur-pâture (et donc aussi une sur-production de déjections bovines plus communément appelées bouses ou beuses en neuchâtelois courant!) favorisent de manière quasiment unique les ombellifères (en forme de groupe de parasols blancs : les coutches toujours en neuchâtelois) ou autres pissenlits donnant des champs uniformes et assez tristounets. Un peu d’attention supplémentaire et vous constaterez une autre grande absence : tout ces papillons colorés qui virevoltaient et émerveillaient nos yeux d’enfants.

Et au fond mis à part l’esthétique, c’est grave ça, docteur?

Si vous avez regardé le Téléjournal sur la Suisse romande du 9.8.2013 soir, vous aurez appris que de nombreux paysans de l’arc jurassien ont de gros soucis à devoir importer du fourrage en quantités exceptionnelles, au point que cela risque de mettre une série d’exploitation en danger de mort économique.

Ce printemps, lorsque nous avons vécu une période grise et pluvieuse, les espèces privilégiées par le problème expliqué ci-dessus n’ont pas pu se développer suffisamment. Cet été, lors d’une période de sécheresse modérée, elles ont souffert de même. Il se rajoute à ce premier problème climatique un deuxième, lui aussi lié à la perte de bio-diversité, la surpopulation de campagnol. Cette dernière puise ses racines, sans jeu de mots involontaire, dans la disparition des haies qui offraient des corridors écologiques aux prédateurs des campagnols, et pour une part également dans la sur-présence de pissenlits notamment contribuant à la croissance des populations.

Un champ moins “gras” mais plus riche d’espèces variées aurait bien mieux traversé les turbulences, et aujourd’hui les exploitations agricoles concernées seraient infiniment mieux positionnées pour faire face à la difficulté.

Le cas du fourrage à acheter en sus relève du bénin, certes pas pour l’exploitant agricole concerné, mais il faut conserver à l’esprit que le monde nous entourant est complexe et nous sommes très loin d’avoir compris toutes les interactions entre les divers écosystèmes, partant de là les conséquences peuvent se révéler infiniment plus graves. A nouveau, l’humanité, en tolérant implicitement des pertes de bio-diversités, prend des risques sans savoir exactement lesquels.

La bio-diversité c’est pas juste un truc d’intellectuel, elle est nécessaire à l’équilibre du monde vivant dont nous sommes un maillon!

Laurent-David JOSPIN

la non-culture pour mieux nourrir le monde

Voici une approche intéressante et innovatrice de par sa simplicité : oser l’idée qu’en agriculture nous nous épuisons à résoudre des problèmes créés par nous-mêmes.

Monsieur Masanobu Fukuoka, micro-biologiste et spécialiste en phytopathologie, japonais de son état et partant très intéressé à la culture du riz,  a passé toute sa vie à diminuer puis supprimer les quantités d’engrais, de pesticides, d’irrigation, etc. etc. pour finalement arriver au même rendement qu’avec une agriculture classique.

Le résultat final mérite le détour.

On inonde, pendant de long mois, habituellement les cultures de riz principalement pour empêcher la pousse des mauvaises herbes. Ici, on choisit volontairement de faire proliférer du trèfle blanc dans une rizière à sec. De cette façon la seule “mauvaise” herbe reste donc ce trèfle, qui comme tout les trèfles possède la propriété de fixer l’azote et donc d’enrichir le sol en profondeur. Au moment voulu, on inonde, permettant au riz de germer, tout en mettant le trèfle en mode “veilleuse”. Une dizaine de jours suffisent et l’on peut arrêter de remettre de l’eau. Le trèfle a été suffisamment ralenti, respectivement l’avance du riz permet à ce dernier de prospérer sans plus être gêné par le trèfle, qui en occupant l’espace résiduel, empêche l’arrivée d’autres mauvaises herbes. Avant la récolte du riz, on sème les céréales d’hiver à la volée. Lors de la récolte du riz, on rend à la terre toute la paille non comestible de la plante. On protège ainsi le sol contre l’assèchement, limite à nouveau l’arrivée de mauvaises herbes, et la décomposition du trèfle permet d’éviter de devoir utiliser des engrais chimiques. Lors de la récolte, on piétine quelque peu les céréales, mais compte tenu du “très jeune âge” des dites céréales, celles-ci s’en remettent sans difficulté. Dans une variante idéale, on laisse courir poulets et canards directement dans le champ. Ces précieux auxiliaires réalisent une chasse aux nuisibles et surtout grâce à leurs déjections, accélèrent la décomposition de la paille qui va contribuer à enrichir le sol également. Le trèfle a été semé après les céréales de façon, à nouveau, garantir l’avantage de ces dernières. On sème le riz avant la récolte des céréales, et le cercle est bouclé lorsqu’on inonde à nouveau le champ pour faire démarrer le riz

Sur cette image, on voit le semis à la volée du riz dans une culture d’orge

Nous obtenons comme résultat final, infiniment  moins d’eau consommée respectivement gaspillée incluant aussi un travail moindre pour l’arrosage, une consommation d’engrais et herbicide nulle, … La terre est d’une vitalité incomparable avec de l’azote fixé jusqu’en profondeur, et également une forte présence de micro-organisme ainsi que de vers de terre garantissant la fertilité des sols pour les années à venir. Il n’y a que des gagnants ici! Euh non, j’ai oublié Monsanto &co, mais comme de toute façon je préférerais les voir disparaître, on ne va pas se plaindre, non?

Et encore une fois, le rendement final est égal ou supérieur à une agriculture classique.

Pour résumer la philosophie de cette “non-agriculture” faire avec la nature plutôt que contre elle.

La non-agriculture a été mise en route dès les années 50 par un Monsieur Japonais, entretemps décoré pour service rendu à l’humanité, nous voulons espérer que personne ne cherchera à l’arrêter.

Laurent-David JOSPIN

PS : l’expression non-culture est une non-traduction d’une expression japonaise non-traduisible, mais je ne pense pas que vous aurez non-compris, et de toute façon la bonne humeur est elle bien comprise.

Source : FUKUOKA Masanobu, La révolution d’un seul brin de paille, Guy Trédaniel Editeurs, Paris, 2010