Monthly Archives: May 2021

Alors cette LOI CO2, sociale ou pas ?

On garde ses bonnes habitudes et vite un petit coup d’oeil dans le rétroviseur de la campagne.

On voit que nos adversaires matraquent avec essentiellement deux mensonges :

Le premier, l’abject : Notre loi CO2 n’aura(it) aucun effet sur le réchauffement climatique. Qualifier cette affirmation d’ignoble reste encore sur la retenue. Bien évidemment, notre participation à l’effort planétaire doit et ne peut se faire qu’à hauteur de notre importance relative en terme de population et niveau de vie. Comme nous sommes 8 millions de Suisses contre 8 milliards d’humains sur la planète, notre contribution se situe de l’ordre du millième. Oui bien sûr, mais si nous, qui appartenons aux plus riches de cette planète, ne faisons pas notre juste part, pourquoi les plus pauvres le feraient ??? Ce mensonge relève d’un égoïsme et d’une irresponsabilité sans limite.

Le deuxième, le stupide : La loi CO2 va pénaliser les plus pauvres de notre pays. Puisque le but de ce post est justement d’évoquer les aspects sociaux de la loi, je me contente ici de rappeler que le réchauffement climatique impactera justement les plus pauvres, car ils ne pourront pas prendre les mesures onéreuses pour se protéger. Au surplus, nous allons développer cela un peu plus loin.

Indépendamment de ceci, les nouvelles internationales clefs n’arrêtent pas d’arriver ces derniers temps.

Nous découvrons sur le site de la RTS, que l’AIE (Agence Internationale de l’Energie) recommande maintenant de renoncer à tout nouvel investissement dans les énergies fossiles.

Quand on connaît l’influence des pays producteurs de pétrole et gaz dans cette institution, c’est presque incroyable et cela montre bien que subitement dans les hautes sphères dirigeantes, on commence d’avoir sérieusement peur des conséquences du réchauffement climatique.

Par ailleurs, le G7 va même un pas plus loin puisqu’il veut cesser de subventionner le charbon, ceci inclut donc les centrales actuellement en activité. L’incidence sera très significative sur le prix des énergies, notamment de l’électricité en Europe qui est actuellement pollué autant au sens figuré que propre par du charbon subventionné utilisé dans des centrales déjà amorties et en fin de vie.

Si vous lisez l’article complet sur le site de la RTS, vous découvrirez que sans aucune ambiguïté, on nous annonce que cette mesure légitimera de contraindre les pays qui ne feraient pas leur part du travail !

Et maintenant, alors, sociale ou pas cette loi CO2 ?

Dans le débat public, l’attaque est un peu toujours la même et ressemble assez à celle déposée sur la page FB du blog :

Monsieur Rubner répète ici un argument, que je suppose avoir été préparé par quelques têtes pensantes, qui passe en boucle lors de chaque débat, à résumer en “c’est injuste pour ceux qui ne peuvent pas se passer de leur voiture, de leur chauffage au mazout, ….”.

La réponse amenée par les débatteurs de notre camp, même si intrinsèquement correcte, me laisse sur ma faim. En effet, on évoque la redistribution via l’assurance maladie et on se lance dans des calculs d’apothicaire pour savoir qui va gagner et qui va perdre.

Ces calculs me désolent, car ils font complètement l’impasse sur une réalité basique, à savoir que le but de la loi est d’induire une modification des comportements. Et dès lors, il suffit de voir les faits pour constater que cette soi-disante punition des automobilistes contraints de l’être n’existe pas, si on fait les bons choix.

Regardons cela en détail (les feuilles de calcul sont à disposition sur demande), je prends ici comme exemple fictif mais basé sur une famille habitant dans un coin perdu du Jura ayant fait l’objet d’un reportage sur la RTS. Elle a impérativement besoin d’un 4×4, et nous retiendrons donc un 4×4 d’entrée de gamme à CHF 40’000.– roulant 30’000 km par année avec une consommation de 6 lt/100.

La famille a conclu un leasing avec valeur résiduelle 0 sans apport sur 60 mois à un taux de 3.5 %, elle va payer globalement CHF 728.– de mensualité leasing, et 30’000 km /100 km * 6 lt = 1’800 lt d’essence à un tarif de CHF 1.6 /lt, donc CHF 2’880.– essence.

Nous obtenons donc 12 * 728 + 2’880 soit CHF 11’616.– hors assurance et taxes.

Et maintenant, soit la même famille qui achète un 4×4 tout électrique avec 500 km d’autonomie (j’ai personnellement testé le véhicule sur lequel je base mon calcul, c’est vrai!) à CHF 50’000.–. Ce modèle montre une consommation effective de l’ordre 12 kWh/100 km, pour le calcul je retiendrai 15 kWh à 15 cts / 100 km (supposition 50 % de la charge en heures pleines, 50 % en heures creuses).

La famille a conclu le même leasing (60 mois, taux 3.5 %, apport zéro, valeur résiduelle zéro).

Elle va payer CHF 910.–/mois de leasing, et donc 30’000 / 100 * 15 * 0.15 soit CHF 675.– en électricité.

Au final, cette famille paye dans cette deuxième variante “taxe CO2 free” 12 * 910 + 675 soit CHF 11’595.–.

Soit une différence de CHF 21.–/année !!!! Je ne relève même pas que les CHF 21.– sont en faveur du véhicule électrique, ce qui compte est qu’en prenant les bons choix la situation ne sera pas péjorée significativement sur le plan économique.

Bien sûr, on peut faire jouer les paramètres et essayer de modifier le résultat final, mais si on se base sur un 4×4 essence encore moins cher, la consommation monte ! Si on se réfère à des taux leasing 0 %, le résultat devient outrancièrement en faveur du véhicule électrique, etc etc . Bref, si on reste honnêtes sur les choix de scénario à comparer, il se dégagera toujours une quasi équivalence.

En ce qui concerne les chauffages à mazout, il existe aujourd’hui d’excellente PAC. On peut sans autre refaire l’exercice ci-dessus de la voiture. Au final, ce sont les choix personnels qui détermineront le résultat.

La question économique évacuée, il reste un point beaucoup plus fondamental à mentionner, quid du futur ?

En effet, nous oublions toujours trop vite les conséquences du réchauffement climatique. Les modèles convergent tous vers des épisodes caniculaires plus fréquents, plus intenses et plus longs.

Le besoin en protection contre les conséquences de ces canicules croîtra donc de manière importante et cela va coûter !!!!

On pense bien sûr à la climatisation, mais en réalité il ne s’agit que d’un aspect minime, presque secondaire. Avec des canicules à ce point si violentes, les rendements agricoles s’effondreront. Le coût de la nourriture va donc monter, ne serait-ce qu’en fonction du coût de l’eau d’arrosage, mais aussi des productions plus faibles à l’hectare. Si nous voulons conserver une filière laitière dans notre pays, nous devrons importer toujours plus de fourrage et de toujours plus loin.

Et puis il y a la question migratoire. Actuellement, nous vivons un psychodrame pan-européen pour quelque chose qui doit se situer de l’ordre de 20 à 25 millions de réfugiés. Les scénarios des agences de renseignement pronostiquent qu’environ 500 millions de personnes se mettront en mouvement rien qu’en Afrique si on ne lutte pas (beaucoup) plus contre le réchauffement climatique et ses conséquences.

L’argument comme quoi on punirait la classe moyenne avec la loi CO2 est donc non seulement faux, mensonger, mais aussi complètement stupide, car c’est en premier lieu les moins favorisés de notre société qui ont urgemment besoin d’une action déterminée et urgente contre le réchauffement climatique !

Laurent-David Jospin

Loi CO2, nécessaire versus insuffisante pour l’environnement ?

Avant d’attaquer notre sujet du jour, jetons vite un petit coup d’œil dans le rétroviseur de la campagne et cette fois plutôt que s’intéresser aux tendances des sondages, élargissons notre point de vue et observons ce qui se passe ailleurs.

Dans l’article précédent, je vous parlais du risque pour notre pays de rester dépendant de l’étranger pour nos sources d’approvisionnement énergétique. Or voilà des nouvelles toutes fraîches confortent ce point de vue.

Nous apprenons d’une part que les services secrets britanniques souhaitent vérifier que les autres économies respectent leurs engagements climatiques (voir extrait partiel publication RTS:)

Mais nous avons également l’UE et les USA qui ont des positions claires (extraits idem ci-dessous)

et

Il ressort de ces articles que d’une part une prise de conscience est en train d’opérer au niveau mondial, mais également que la peur de l’inégalité de traitement est bien présente et on cherche à s’assurer que les acteurs importants joueront le jeu. L’UE notamment envisage une taxe carbone aux frontières.

En confirmation de l’article précédent, il apparaît donc de plus en plus évident que rentrer dans un mécanisme de réduction des émissions carbone tel que prévu par la loi CO2 n’est pas une option mais un impératif pour que notre pays et nos entreprises n’aient pas à subir des pressions et des sanctions hautement pénalisantes.

Venons en à notre sujet du jour, l’environnement nécessite-t-il vraiment une telle loi ou respectivement peut-il s’en contenter ?

On peut fixer l’émergence du débat environnemental plus ou moins au rapport du club de Rome (aussi appelé rapport Meadows). En résumé ultra-succinct, ce rapport, principalement centré sur les ressources, concluait que si aucun changement majeur n’était apporté à notre gestion de la croissance, un effondrement de notre civilisation était inéluctable. Ce rapport a depuis toujours été fortement critiqué, mais force reste de constater que les courbes prédites en 1972 se révèlent jusqu’à aujourd’hui toujours étonnamment exactes.

Quand on parle CO2, on pense climat et donc GIEC (Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat). Fondamentalement, le rapport du Club de Rome cherche à intégrer l’ensemble des facteurs significatifs alors que le GIEC se concentre sur l’aspect climat.

Depuis 1990, le GIEC a produit 5 rapports. Une constante se dégage avec une masse de critiques vociférant à l’exagération lors de la parution, puis lors de la version suivante, le constat qu’en réalité les prévisions étaient encore trop optimistes.

Lorsque vous étudiez la météorologie en tant que futur pilote d’avion, on vous apprend qu’une prévision météo ayant divergé va logiquement continuer à diverger. En clair, il faut partir de l’idée qu’une péjoration récente par rapport à la prévision initiale aura encore tendance à se renforcer dans l’intervalle de temps suivant.

Si on applique cette règle empirique au climat dans son ensemble, on peut légitimement craindre que les prochains rapports du GIEC continueront sur cette lancée d’être toujours plus graves qu’attendu.

On pourrait donc entendre le discours des opposants à la loi du côté Grève du Climat. Toutefois, la composante politique ne peut-être négligée.

Si, par catastrophe, la loi venait à être refusée, il faudrait alors remettre l’ouvrage sur le métier. La loi qu’on nous propose aujourd’hui puise son fondement dans un débat qui avait déjà commencé bien avant la votation de la loi que nous proposions en 2015 (et qui soit-disant devait être plus rapidement appliquée si notre projet était refusé). Précisément, suite à l’adoption en 2013 de la révision de 2011 de la loi adoptée en 1999, la question s’était déjà imposée comme nécessaire.

Mais voilà, la froide réalité est que de 2013 à 2021, 8 années se sont passées, et que dès lors si nous rajoutons 8 années pour refaire une nouvelle mouture de la loi, nous arrivons précisément à cette date butoir de 2030 prévue par le rapport du Club de Rome.

Nous n’avons simplement pas le choix. La loi actuelle, même avec toutes ses imperfections, doit être appliquée de toute urgence. Et une nouvelle loi améliorée doit être mise en travail pour pouvoir être disponible aussi vite que possible, ce qui en temps politique signifie quelque chose entre 5 et 10 ans !

Laurent-David Jospin