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Sortie du nucléaire ? Oubliez la photo-finish !

Mes chers lecteurs devaient bien s’en douter : il semblait inimaginable que je ne prépare pas un petit “quelque chose” pour la campagne sur l’initiative des Verts pour une sortie programmée de l’énergie nucléaire. Tel était bien le cas et nous nous approchions de la publication quand Le Temps m’a sollicité pour leur proposer un texte pour lancer la campagne. Étant dans l’impossibilité temporelle de recréer quelque chose de complètement différent, j’ai choisi d’extraire le chapitre économique/financier que vous pouvez donc trouver soit dans la parution papier du Temps du samedi 22 octobre 2016 ou sur le lien ici. La version complète de ce chapitre sera ré-intégrée sur le blog après la fin de la campagne.

Mon choix s’était porté sur les aspects financiers, car cet argument ultime des pro-nucléaires se révèle dans les faits également faux.

Mais il reste bien sûr des choses importantes à dire comme par exemple sur les thèmes de la sécurité de l’approvisionnement, la gestion des réseaux, la qualité environnementale du courant consommé, les aspects juridiques, les risques, la fin de cycle d’exploitation, ainsi que les considérations morales. Faisons donc un petit passage en revue.

Fukushima Plant

Sécurité de l’approvisionnement

Pour ceux qui ne le sauraient pas encore, Leibstadt et Beznau I ne fonctionnent pas à l’instant où j’écris ces lignes. Le manque en terme de volume se situe tout à fait dans le même ordre de grandeur que ce qui devrait être arrêté en 2017 (en arrondi 8500 Leibstadt + 2500 Beznau I ⇒ 11’000 GWh contre 2500 Beznau I + 3000 Beznau II + 3000 Mühleberg ⇒ 8’500 GWh). Et comme vous l’avez certainement remarqué, il n’y a plus d’éclairage la nuit et nous prenons tous des douches à 16°C!! Sans plaisanter, il ne peut y avoir le moindre problème car nous nous trouvons face à une surproduction au niveau européen provoquée par le coût artificiellement bas du charbon. En outre, rien que les projets solaires en attente pour l’obtention de la RPC permettraient de couvrir ce qui doit être arrêté.
En ce qui concerne le futur prévisible, de plus en plus de citoyens européens choisissant de se rendre partiellement ou totalement autonomes sur le plan énergétique, on peut affirmer avec certitude que la surproduction européenne n’ira qu’en se renforçant.

20150807_xl_P1010973_Erneuerbare_Energien_in_Oberstdorf_Photovoltaik-SolaranlagenExemple d’un village en cours de transition, source Molgreen

Gestion des réseaux

Vous l’avez forcément entendu une fois ou l’autre dans les débats sur la question énergétique “et comment garantirez-vous l’approvisionnement la nuit lorsque le soleil ne brille pas?“. Comme j’ai déjà beaucoup écrit sur la question, je vous propose de vous référer à ma publication « Comment démolir tout en faisant semblant de soutenir (ou presque) » où je traite assez profondément la question. Et pour vous donner juste un aperçu : sachez que le nucléaire souffre exactement du même problème mais symétrique. Une centrale atomique produit en continu et n’arrive pas à s’adapter à la demande. Dès lors, la nuit lorsque la vie économique ralentit fortement (les bureaux et les industries restent les plus grands consommateurs), la production devient totalement excessive et pose problème. C’est notamment pour cette raison qu’il existe des heures creuses la nuit et que l’on fait démarrer les chauffe-eaux électriques la nuit. En réalité, un réseau bâti sur une multitude de sources variées présente une bien meilleure résilience qu’un réseau dépendant pour 40% de centrales nucléaires vieillissantes pour rester modéré dans le propos.

Qualité écologique du courant fourni

Tant qu’à mentir, allons-y franchement!! Les promoteurs du nucléaire helvétique nous bassinent avec cette contre-vérité comme quoi le fait d’arrêter les centrales chez nous conduira à ce que nous importions du courant sale français (nucléaire) ou allemand (charbon). Or, ils le savent parfaitement, c’est déjà le cas maintenant, car nos barrages équipés en pompage-turbinage importent du courant bon marché la nuit pour le revendre plus cher en journée. Pour l’exprimer en chiffres, le courant électrique produit en Suisse se situe du bon côté du bilan carbone avec plus ou moins 10 gr de CO2 par kWh, mais par contre le kWh consommé s’élève lui à un très mauvais 100 gr/kWh.
La seule vraie réponse à cette interrogation légitime consiste à développer nos renouvelables indigènes, pas à s’obstiner dans une voie garantie sans issue.

Juridique

On entend souvent dire que, si une date de fermeture leur était imposée, les exploitants des centrales atomiques pourraient se retourner contre l’Etat et demander un dédommagement. Seule une profonde méconnaissance du contexte global peut conduire à croire une telle sottise.

En effet, avant que les propriétaires aient la moindre chance de gagner une procédure judiciaire, ils devraient démontrer avoir parfaitement rempli toutes leurs obligations et n’avoir aucune responsabilité dans la rupture de contrat. Or comme nous le savons au minimum le problème des déchets n’est pas solutionné de manière pérenne et sans même parler des risques manifestement sous-estimés.

Si par un extraordinaire tour de passe-passe juridique, ils arrivaient à réaliser une telle démonstration, il leur resterait à prouver l’existence d’un dommage. Les centrales atomiques suisses produisant actuellement à perte, démontrer un préjudice économique réel relève plus de la mission impossible que de quoi que ce soit d’autre.

Et même, si, contre toute attente, ils venaient à gagner, cela ne changerait paradoxalement rien du tout pour les citoyens qui sont aussi des payeurs dans le cas d’espèce. Comment ? Nous savons maintenant de manière certaine, que les coûts de démantèlement dépassent très largement les montants épargnés prévus pour cette opération oh combien essentielle. Exploiter lesdites centrales nucléaires encore quelques années n’est d’aucun secours pour les propriétaires puisque nous l’avons vu, ils produisent actuellement à perte et la situation ne risque pas vraiment de s’améliorer au vu des frais de maintenance grandissant sur des centrales largement entrées dans leur troisième âge.

Dès lors si un tel cas de figure, excessivement peu probable au demeurant, se présentait malgré tout, nous compenserions l’un contre l’autre et le résultat comptable net restera strictement le même.

Important : le point de dernière minute (voir à la fin du présent post) clôt cette question exactement dans le sens que je défends depuis le début de la campagne!

Risques

Les centrales nucléaires seraient sensées être les objets les plus sûrs que l’humanité n’aie jamais construit. Bon, un petit coup d’œil dans le rétroviseur et que voit-on ? Three Miles Island (USA) où même si au final aucune conséquence grave n’est survenue, on a frôlé une catastrophe majeure, Tchernobyl (Russie/Ukraine) où on n’ose plus compter les “bébés-monstres” qui naissent encore aujourd’hui, Fukushima (Japon) dont les conséquences ne sont pas encore complètement déterminées aujourd’hui mais graves avec certitude, ainsi qu’un nombre impressionnant d’accidents les plus variés dans les centrales elles-mêmes mais également dans toute la filière comme par ex. les usines de traitement de l’uranium ou autres (voir listes accidents nucléaires ici ). Et pour ceux qui seraient tentés de croire “qu’y en a point comme nous” et nos centrales à nous n’auront jamais d’accident, j’aimerais rappeler le cas Lucens qui lui aussi aurait pu tourner bien plus mal et nécessitera une surveillance continue de la radio-activité, entre autres de l’eau de la nappe phréatique, pour des milliers d’années.

Ceci étant rappelé, certaines conséquences ne relèvent pas du risque mais de la réalité glauque bien concrète pour les populations concernées. Les mines d’uranium notamment présentent ici un bilan sanitaire catastrophique. Lorsqu’on étudie par ex. le cas de la mine d’Arlit au Niger, on ressent une immense nausée. Les taux de cancer, notamment de la plèvre pulmonaire vu les contaminations par aérosols, explosent jusqu’à plus de 200 km de la mine et condamnent des milliers d’innocents à des morts lentes atroces. En achetant de l’uranium sur les marchés internationaux, nous devenons complices de ce crime à échelle industrielle, car, même si notre uranium provient d’une autre source (pas très propre non plus d’ailleurs), nous soutenons la demande mondiale qui pousse des groupes industriels sans scrupule à continuer cette exploitation.

Rappelez-vous l’histoire du secret bancaire, nous avons fait mine d’ignorer une réalité trop longtemps et cela a fini par nous exploser à la figure. Vous pouvez en être certain, un jour les descendants des populations victimes de nos agissements finiront par venir nous demander des comptes et l’addition promet d’être salée. Il est de notre intérêt primordial de mettre un stop à notre responsabilité dans ce domaine le plus vite possible.

Fin d’exploitation

Aujourd’hui plus personne ne devrait encore faire semblant d’ignorer que les coûts aussi bien de démantèlement que de gestion des déchets ont été totalement sous-estimés.

La meilleure preuve se trouve du côté de la France, notre grande voisine si fortement pro-nucléaire jusqu’à l’aveuglement. Et voilà que même elle par sa Cour des Comptes vient de reconnaître la sous-dotation des fonds destinés au démantèlement et traitement des déchets.

Rajoutez à cela que chaque année de fonctionnement supplémentaire creuse encore plus le trou financier, rien que cette raison pousse à conclure à la nécessité de stopper le plus vite possible l’hémorragie avant que cela ne devienne tout simplement trop grave.

Et l’éthique dans tout cela

On lit souvent cette magnifique pensée : ” nous n’héritons pas la terre de nos parents, nous l’empruntons à nos enfants”. Au vu de l’évolution de l’impact de l’être humain sur son milieu, on devrait peut-être encore compléter l’énoncé avec “et nous la volons à nos petits-enfants“.

Toute la question tourne autour de cet aspect, de quel droit nous permettons-nous de condamner les générations futures pour des milliers d’années à devoir gérer les conséquences de nos actes et ce alors que les alternatives existent ?

Il me semble entendre les voix qui disent “à chaque génération ses problèmes, nos enfants feront ce qu’ils voudront” . Et bien justement pas! Car nous leur imposons un problème lourd aux conséquences potentiellement mortelles, et ce alors même que nous n’avons aucune certitude que le savoir-faire nécessaire sera encore disponible. On l’oublie trop souvent, mais l’histoire de l’humanité est faite d’avancées spectaculaires et de reculs tout autant impressionnants. Les romains connaissaient les bains thermaux, le chauffage au sol, et un système politique assez proche du nôtre. 500 années plus tard, on se retrouve dans le moyen-âge profond avec un recul de civilisation absolument effrayant. Si nous pouvions remonter dans le temps et aller raconter l’histoire à venir aux membres du sénat romain au temps de Jésus-Christ, ils nous riraient au nez voire nous condamneraient pour hérésie. Et pourtant ….

Que feront nos descendants s’ils ne disposent plus de la technologie nécessaire alors que la masse de déchets que nous leur léguerons les condamnera à vivre l’enfer sur terre?

Non, définitivement non, notre attitude n’est moralement pas acceptable! Et l’opportunité unique qui nous est donnée aujourd’hui de changer cela, doit être prise résolument.

L’alternative existe-t-elle?

La liste des possibilités pour réaliser une transition énergétique bénéficiaire à la fois pour notre environnement ainsi que notre économie s’allonge jour après jour. Sans même descendre au niveau des détails, rappelons que nous pouvons gagner en efficience, produire grâce aux énergies solaires, éoliennes, géothermiques, mutualiser nos ressources avec nos voisins européens, …

Nous devons donc prévoir de remplacer à terme 35% de notre production d’énergie électrique. Selon ma publication citée dans la rubrique risque plus haut, nous pouvons facilement trouver 20% avec le photovoltaïque et plus encore à futur. L’éolien peut également nous apporter une contribution du même ordre (20%). Réhausser les barrages contribuerait à hauteur de 10-15%. Une politique volontariste dans l’efficience devrait contribuer à hauteur de 10%. (note : vous trouvez des auteurs bien plus optimistes, mais à mon sens ils ne prennent pas en compte correctement l’effet rebond). En bref, nous disposons d’un volant directement disponible de plus de 50% qui couvre sans la moindre difficulté ces 35%. Et encore, nous ne parlons même pas de l’excédent de production électrique européen qui pourrait lui aussi être mis à contribution.

Tout simplement dit, ma conviction profonde peut se résumer en celui qui ose encore mettre en doute la possibilité de réaliser une transition énergétique prouve en réalité sa mauvaise foi.

Dernière minute – Dernière minute

Selon publication du Sonntagszeitung de ce matin même (repris partiellement par la RTS ici ), un document confidentiel de la commisison de l’énergie du Conseil National montre qu’Alpiq cherche à se débarasser de ses centrales nucléaires à n’importe quelle condition.  On cite en particuliers le Président du Conseil d’Administration M. Jens Halder en ces mots (traduction libre de l’allemand) “J’ai en premier lieu offert nos centrales à EDF gratuitement. Cette offre a été refusée. EDF a elle-même plein de problèmes financiers avec ses propres centrales“. Il a également affirmé qu’Alpiq perdrait de l’argent pour les 10 prochaines années et n’avoir aucune visibilité sur ce qui viendra après.

Copie d’écran du Sonntagszeitung (cliquez sur la miniature et un nouvel onglet s’ouvre avec le texte lisible)

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Ce fait nouveau devrait logiquement conduire à une acceptation massive de la sortie de l’énergie nucléaire, car il prouve à la fois la véracité des affirmations des initiants tout autant que les mensonges des opposants.

Conclusions

En général, pour toute question politique, il convient de réaliser une pesée des intérêts et on constate fréquemment que chaque variante offre des avantages mais aussi des inconvénients, des chances et des risques, des espoirs contre des craintes. Aujourd’hui la sortie structurée du nucléaire proposée à la population appartient aux rares exceptions qui confirment la règle. Continuer dans la voie sans issue de l’énergie atomique n’apporte que des inconvénients, sans espoir à l’horizon, et avec un risque infini à la clef.

Il faut espérer avec force que les mensonges des opposants, soutenus par une puissance de feu économique importante, n’induira pas la population en erreur une nouvelle fois.

Laurent-David JOSPIN

Remerciements : Giovanni, Amanda, Laurent, et Maika pour les précieuses relectures et autres coups de main

Quand la Mère Patrie trahit ses enfants

Nous recevons si souvent des nouvelles comme quoi les personnes à l’étranger ont de la difficulté à ouvrir ou même simplement conserver un compte bancaire qu’une de plus ou de moins n’y change plus grand chose. Récemment encore, nous avons eu droit à une nouveauté : plus de carte de crédit pour les personnes à l’étranger auprès de Postfinance, y compris, et c’est là que cela se corse, pour nos compatriotes à l’étranger.

Et pourtant ces dites personnes à l’étranger appartiennent pour la grande majorité à la catégorie des honnêtes citoyens suisses respectueux des lois, qui aimeraient bien pouvoir vivre comme tout un chacun!

Peut-on considérer comme acceptable qu’un suisse de l’étranger ne puisse plus avoir de carte de crédit auprès de Postfinance, qui soit-dit en passant bénéficie d’un soutien étatique certes indirect mais bien réel de part les missions de service public attribuées à la Poste?

Image d’illustration du communiqué de la TSR

Dans cette discussion, on oppose souvent l’aspect moral (malheureusement oui, c’est pas juste!) aux cotés pratiques et financiers (mais c’est nécessaire pour nos banques et notre économie).

Et bien je me permettrai de penser que ce calcul est profondément faux et risque bien de nous coûter très cher à moyen terme! Les Suisses de l’étranger représentent notre première force de représentation face au concert des nations  d’une manière générale. Mais plus précisément encore, un nombre important d’entre-eux appartiennent à la catégorie des expatriés pour raisons professionnelles. En clair et en français, ils défendent les intérêts de nos entreprises à l’étranger et leur travail garantit nos places de travail orientées exportation ici en Suisse.

La trahison que nous leur faisons vivre en les empêchant d’avoir d’accès à des services de base nécessaires voir parfois indispensables pour garantir leur lien avec le pays laissera inévitablement des traces. Et comme l’élastique que l’on tend  et tend encore, lorsque le point de rupture est dépassé, il apparaît subitement un dommage dont tout le monde fait semblant d’être surpris. Maman mon élastique est tout cassééééé! Tu aurais dû être plus soigneux! Il est bon pour la poubelle mon chéri!

Aujourd’hui nous sacrifions l’important au profit de l’urgent. Nous favorisons le court terme au détriment du long terme. La prospérité dont nous bénéficions à l’instant ne s’est pas bâtie sur ce genre de valeur. Bien au contraire, notre histoire regorge de précurseurs voir carrément d’aventuriers qui ont pris des risques pour permettre à la collectivité d’avancer.

Si les règles mises en place dans le domaine financier ne permettent plus à, encore une fois, des honnêtes citoyens de garder un lien économique normal avec leur propre pays, alors ces règles sont mauvaises, et ils est d’urgent de réfléchir à les corriger voir les abolir le cas échéant. Blaise Pascal affirmait “qui fait l’ange fait la bête“, il ne semble pas usurpé du tout de continuer “qui fait le paradis, fait l’enfer”!

Le problème que nous avons avec nos expatriés n’en est qu’une manifestation parmi d’autre, mais si nous continuons à nous crisper sur une position générale ultra défensive, nous préparons une longue glissade qui s’annonce bien douloureuse et surtout difficilement arrêtable une fois entamée.

Les vicissitudes que nous faisons vivre à nos concitoyens expatriés appartiennent clairement à la catégorie des injustices, mais c’est aussi en premier lieu un affaiblissement de notre pays.

La Mère Patrie trahissant ses enfants ne devra pas s’étonner lorsqu’ils s’éloigneront d’elle!

Laurent Jospin

Référence :
Article web TSR :   http://www.rts.ch/info/economie/6949634-postfinance-abolit-les-cartes-de-credit-pour-ses-clients-a-l-etranger.html

Si je devais n’en signer qu’une, cela serait celle-là!

Voilà très exceptionnellement sur ce blog, je vais me permettre de vous demander de signer une pétition. Bon me direz-vous quel peut-être ce sujet si important qu’une des règles non dites de ce blog soit violée?

Allons droit au but, si la société xyz vous annonçait qu’elle vient de déposer un brevet sur un mélange composé d’oxygène, d’azote, un peu de CO2 (trop! beaucoup trop!!), et quelques autres gaz rares, qu’à partir de maintenant cela portera le nom d’air ambiant, et que le fait de respirer ce produit tout à fait révolutionnaire vous rend redevable de royalties auprès de xyz, vous hurleriez, avec raison d’ailleurs, au spoliateur, voir à l’assassin, toujours avec raison puisque celui qui ne peut payer doit cesser de respirer!

Et bien, même si l’exemple ci-dessus vous semble tiré par les cheveux, c’est exactement de cela dont il s’agit, car breveter le vivant ne relève pas d’une autre logique. Toutes les explications alambiquées que l’on vous produira pour justifier une soi-disant plus value ne servent qu’à noyer le poisson et ne possèdent aucune justification réelle. En physique lorsqu’un système mécanique devient trop complexe pour pouvoir être résolu avec les équations simple ou de bas niveau comme F=MA, on élève notre point d’observation et on considère l’énergie globalement du système.

Et bien, on peut faire la même chose ici : personne ne devrait être assez naïf pour croire que nos vendeurs d’ OGM et autres velléitaires de la captation du vivant à leur seul profit ont pour but l’enrichissement de l’humanité! Non, ils veulent s’enrichir eux, et si possible nous mettre dans une situation de dépendance totale.

Si vous avez encore le moindre doute à ce sujet, je vous encourage à regarder un extrait d’une ancienne émission sur le coton OGM, à trouver ici : http://www.rts.ch/play/tv/mise-au-point/video/mauvais-coton?id=4477031

C’est pas long et vraiment très instructif! Et alors vous vous accorderez avec moi pour dire que le terme d’assassin n’est pas usurpé.

Vraiment, j’aimerais vous convaincre de prendre la petite minute nécessaire à signer cette pétition demandant aux autorités européennes de renoncer à toute législation qui permettrait de breveter le vivant et en particuliers de ne pas accorder à Monsanto une nouvelle série de brevets allant dans cette direction : https://no-patents-on-seeds.org/fr/activites-recentes/signez-maintenant

Les générations futures nous en seront reconnaissantes.

Laurent-David JOSPIN

Je déteste que l’on change les règles au cours du jeu mais …

… Pour cette fois exceptionnellement, ma conviction me pousse à dire haut et fort que cela était justifié. La Suisse vient de se faire condamner à Strasbourg devant la CEDH (Cours Européenne des Droits de l’Homme) pour une triste histoire liée à l’amiante.

Bien évidemment, le fait que mon pays se fasse condamner ne m’enchante guère, mais néanmoins la décision des Juges de Strasbourg est manifestement emprise d’un sens la vraie justice.

En droit, il existe une notion de prescription pour permettre à un éventuel auteur d’une infraction d’échapper à toute sanction s’il n’est pas poursuivi dans un délai donné propre à chaque infraction. Il ne s’agit pas ici d’un “cadeau” que l’on fait au criminel mais d’un mécanisme mis en place pour permettre à notre société de fonctionner le mieux, ou le moins mal possible selon votre ressenti, et ne pas être perturbée en permanence par des histoires surgissant d’un trop lointain passé.

L’idée sous-jacente de ne pas poursuivre des actes n’ayant plus aucune incidence sur la vie actuelle détermine directement la durée de la prescription. Un crime d’une portée sans limite au regard de la durée d’une vie humaine devient donc logiquement imprescriptible, On pense ici tout de suite aux génocides et autres crimes contre l’humanité.

Dans le cas de l’amiante, la durée de la prescription en droit suisse est, pour l’instant, de 10 ans. Or voilà l’intervalle de temps entre l’atteinte à la personne (crime) et l’apparition des symptômes ne relève d’aucune logique simple mais peut atteindre des délais de plusieurs dizaines d’années.

Dans le cas qui nous occupe, la personne a déclaré un cancer de la plèvre globalement 30 ans après l’exposition à l’amiante. Sur cette base, le Tribunal Fédéral a eu une lecture du sens de la prescription étroite et a refusé le droit à un procès en dédommagement pour la famille lésée en argumentant que la démarche dépassait très largement le délai prévu par la loi de 10 ans.

L’analyse de la  CEDH se base-elle sur l’impossibilité pratique des victimes à obtenir réparation puisque la plupart des cancers générés par une exposition à l’amiante se déclarent bien au-delà de ces fameux 10 ans.

Cette évolution du droit mérite d’être relevée. Ne serait-ce que 10 ans plutôt un tel jugement restait du domaine des pures illusions.

Sur ce, il semblerait que le Parlement envisage une modification de la loi dans le sens d’un démarrage de la prescription au moment de l’apparition des symptômes et non plus de l’exposition à l’amiante.

Une telle évolution de la loi me semble être de la plus élémentaire justice! Et on doit aussi en tirer un parallèle en toute cohérence avec les industries générant des pollutions environnementales dont les conséquences se font attendre sur le long voir très long terme (chimie, gaz de schiste, nucléaire, … ) .

Si aujourd’hui, nous passons une loi disant que la responsabilité économique des industries polluantes ne s’éteint qu’après que les conséquences aient pleinement déployées leurs effets d’une part et que d’autre part les ayants-droits (actionnaires et assimilés) de l’industrie concernée se substituent obligatoirement en cas d’insolvabilité du pollueur (faillite ou assimilé), dès demain plus aucune caisse de pension n’investira dans des business irrespectueux de l’environnement, ni aucune banque ne leur prêtera d’argent, et la grande majorité de leur sous-traitants hésiteront fortement à continuer toute relation d’affaires.

Oui, en une seule loi nous pouvons changer radicalement les comportements courts-termistes  de l’industrie et de la finance! Ma conviction est que même sans la mise en place d’une loi comme évoquée, le mécanisme vécu dans le cas de l’amiante se répétera à futur, car scientifiquement parlant aujourd’hui plus personne ne peut dire “nous ne savions pas“. Simplement, si nous voulons induire un changement et éviter toutes les conséquences qu’il est encore possible d’éviter, nous ne pouvons faire l’économie d’inclure dans notre ordre juridique dès aujourd’hui un mécanisme responsabilisant les auteurs des grandes pollutions dont les conséquences se développent quelques fois bien au-delà de la vie des entreprises concernées.

Et puis passer cette loi, appelée de mes vœux, présenterait un avantage évident : dans 20 ans nous n’aurons pas besoin de changer une fois de plus les règles du jeu au cours de la partie …

Laurent David Jospin

Source : site web Radio Télévision Suisse Romande “http://www.rts.ch/info/suisse/5680225-la-famille-d-une-victime-de-l-amiante-obtient-gain-de-cause-a-strasbourg.html